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07/11/11

La Cour Pénale Internationale (CPI)

La Cour Pénale Internationale (CPI) de La Haye est chargée de poursuivre les individus coupables des crimes les plus graves au regard du droit international, crime de guerre, crime contre l’humanité, crime de génocide.

Il faut la distinguer de la Cour Internationale de Justice (CIJ), elle aussi basée à La Haye, mais qui elle est la juridiction suprême de l’ONU, et qui juge les Etats. On se souviendra bien sur de l’avis de la CIJ condamnant Israël pour la construction du Mur de séparation en juillet 2004. Il ne faut pas non plus confondre la CPI et le TPIY (Tribunal Pénal pour l’Ex-Yougoslavie), souvent appelé TPI, qui poursuit lui aussi des individus, mais comme son nom l’indique, ce tribunal ne s’intéresse qu’à l’Ex-Yougoslavie.

« La création de la Cour Pénale Internationale est un gage d’espoir pour les générations à venir et un pas de géant sur la voie du respect universel des droits de l’homme et de l’état de droit ». Kofi Annan, Secrétaire Général de l’ONU, en date du 18 juillet 1998, à l’occasion de la signature du Statut de Rome de la CPI.

En juillet 1998, une conférence diplomatique a adopté la Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale. Le statut de Rome définit les crimes, le mode de fonctionnement de la Cour, ainsi que la manière dont les Etats devront coopérer avec elle. La 60ème ratification nécessaire pour que la CPI entre en fonction a été déposée le 1 avril 2002 et le Statut de Rome est entré en vigueur le 1er juillet 2002. Depuis le 21 juillet 2009, 110 pays sont États Parties au Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale l(a France a ratifié, mais pas Israël ni les Etats-Unis par exemple). La CPI juge des personnes individuelles, contrairement à la Cour Internationale de Jusitce de l’ONU (CIJ, qui a notamment rendu un célèbre avis consultatif sur le Mur de l’apartheid construit par Israël).

 

Qu’est ce que la Cour Pénale Internationale (CPI) ?

La Cour est une institution judiciaire indépendante, chargée de mener des enquêtes et de juger les personnes accusées des crimes les plus graves ayant une portée internationale, à savoir le crime de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre. La Statut de Rome prévoyant la création de la Cour pénale internationale a été signé le 17 juillet 1998, et la Cour a été officiellement créée le 1er juillet 2002, date à laquelle le Statut de Rome est entré en vigueur. Son siège est à La Haye. En septembre 2010, 113 Etats sur les 192 que connait l’ONU ont ratifié le Statut et acceptent l’autorité de la CPI. Trente-cinq États, dont la Russie et les États-Unis d’Amérique, ont signé le Statut de Rome, mais ne l’ont pas ratifié. La CPI peut en principe exercer sa compétence si la personne mise en accusation est un national d’un État membre, ou si le crime supposé a été commis sur le territoire d’un État membre, ou encore si l’affaire lui est transmise par le Conseil de Sécurité. Elle est conçue pour compléter les systèmes judiciaires nationaux : elle ne peut exercer sa compétence que lorsque les juridictions nationales n’ont pas la volonté ou la compétence pour juger de tels crimes. L’initiative en matière d’enquête et de jugement de ces crimes est donc laissée aux États. On dit que c’est une cour occidentale, défendant le droit des puissants… Le double standard existe, mais l’acteur est en le Conseil de sécurité, pas la CPI. La Cour n’existe que par les ratifications des Etats, parmi lesquels on compte 30 États d’Afrique, 14 États d’Asie, 17 États d’Europe orientale, 24 États d’Amérique latine et des Caraïbes, et 25 États d’Europe occidentale et autres États. Ni les US, ni la Chine, ni la Russie. Comme bras judiciaire de l’impérialisme, on fait mieux… La CPI a ouvert 5 dossiers qui concernent tous le continent africain, ce qui permet des critiques faciles. Mais dans 4 cas, ce sont les pays eux-mêmes qui ont demandé à la Cour de prendre en charge des procédures qu’ils ne pouvaient assumer. Dans l’affaire du Soudan, pays n’ayant pas ratifié le traité de Rome, la CPI enquête car elle a été saisie par le Conseil de sécurité. Ainsi, le double standard est le fait de cette instance politique, pas de la Cour.

Compétence de la Cour

Quelle est la compétence de la Cour, c’est-à-dire pour quels crimes et pour quelles personnes est-elle compétente ?

1. Compétence matérielle : La CPI est compétente à l’égard de quatre catégories de crimes, généralement considérés comme les « crimes les plus graves » : le crime de génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et, lorsqu’une définition aura été adoptée, le crime d’agression. Par exemple l’article 8 paragraphe 2 rappelle que constitue un « crime de guerre » : « le transfert, direct ou indirect, par une puissance occupante d’une partie de sa population civile, dans le territoire qu’elle occupe, ou la déportation ou le transfert à l’intérieur ou hors du territoire occupé de la totalité ou d’une partie de la population de ce territoire ». Voir ici les définitions des crimes.

2. Compétence personnelle et territoriale : La CPI est compétente pour juger les crimes

- commis par un ressortissant ou sur le territoire d’un Etat partie à son statut, ou d’un Etats non partie qui a fait une déclaration exceptionnelle acceptant la compétence de la Cour.

- lorsque c’est le Conseil de Sécurité qui défère une situation à la CPI, la compétence de celle-ci n’est pas limitée aux ressortissants et territoires des Etats parties, mais elle sera déterminée par les termes de la saisine.

3. Compétence temporelle : La CPI est compétente pour juger les crimes commis après le 1er juillet 2002 (date d’entrée en vigueur de son statut).

La Cour est donc compétente pour engager des poursuites contre des personnes physiques dans le cas où :

- les crimes ont été commis sur le territoire d’un Etat qui a ratifié la Statut de Rome ;

- les crimes ont été commis par un ressortissant d’un Etat qui a ratifié le Statut de Rome ;

- un Etat n’ayant pas ratifié le Statut de Rome a fait une déclaration par laquelle il reconnaît la compétence de la Cour pour le crime commis ;

- des crimes ont été commis dans des circonstances qui mettent en danger la paix et la sécurité internationales ou y portent atteinte, et où le Conseil de sécurité a saisi la Cour conformément à l’article 7 de la Charte de l’ONU.

Qui peut saisir la Cour ?

Le Statut de Rome prévoit trois procédures de saisine de la Cour :

  • le procureur de la Cour peut ouvrir une enquête lorsqu’un ou plusieurs crimes ont été commis, sur la base d’informations émanant d’une source quelconque, y compris de la victime ou de ses proches, mais seulement dans le cas où la Cour est compétente.
  • les Etats qui ont ratifié le Statut de Rome peuvent demander au procureur d’ouvrir une enquête dans le cas où un ou plusieurs crimes ont été commis, mais seulement si la Cour est compétente.
  • le Conseil de Sécurité de l’ONU peut demander au procureur d’ouvrir une enquête dans le cas où un ou plusieurs crimes ont été commis. Contrairement aux deux procédures évoquées ci-dessus, la Cour est compétente lorsqu’elle est saisie par le Conseil, même si les crimes ont été commis sur le territoire d’un Etat qui n’a pas ratifié le Statut de Rome ou par un ressortissant d’un tel Etat.

Toutefois, dans chacun de ces cas, il incombe au procureur, et non aux Etats ni au Conseil de sécurité, de décider de l’opportunité d’ouvrir une enquête et, au vu des conclusions de celle-ci, d’engager des poursuites, sous réserve de l’accord de la Chambre préliminaire de la CPI.

Quel est le lien avec les juridictions nationales ?

Les juridictions nationales resteront compétentes pour juger ces crimes. En vertu du principe de « complémentarité », la CPI n’interviendra que dans les cas où les tribunaux nationaux n’auront pas la volonté ou seront dans l’incapacité de le faire. En effet, un gouvernement peut ne pas avoir la volonté d’engager des poursuites contre ses propres citoyens, en particulier s’il s’agit de personnalités importantes.

1. Critères déterminant le manque de volonté :

  • Procédure engagée ou décision prise dans le dessein de soustraire la personne concernée à sa responsabilité pénale ;
  • Retard injustifié incompatible avec l’intention de traduire en justice la personne concernée ;
  • Procédure menée de manière non indépendante ni impartiale, incompatible avec l’intention de traduire en justice la personne concernée.

2. Critères déterminant l’incapacité : effondrement de la totalité ou d’une partie substantielle de l’appareil judiciaire de l’Etat concerné ou indisponibilité de celui-ci, rendant impossible l’appréhension de l’accusé, la récolte d’éléments e preuve ou affectant autrement le déroulement de la procédure.

La CPI et la France

Lorsqu’un pays ratifie le Statut de Rome de la CPI, il a pour obligation de coopérer pleinement avec cette instance, par exemple en prenant des mesures au sujet des mandats d’arrêt internationaux délivrés par la Cour ou en assistant cette dernière dans la recherche de témoins. Le pays concerné doit donc s’assurer que ses lois ne risquent pas d’entraver cette coopération et, le cas échéant, adapter sa législation. Chaque pays doit adapter son droit interne pour le mettre en adéquation avec le droit international, dans ce cas le Statut de Rome de la CPI.

A cet effet le France a adopté la loi de coopération avec la CPI le 26 février 2002, qui concerne seulement l’extradition de personnes arrêtées en France suit à un mandat d’arrêt de la CPI, et pas le fait que la France soit dans l’obligation de juger les personnes accusées de crimes de guerre, crimes contre l’humanité ou crimes de génocide. La France s’oblige donc à extrader, mais pas à poursuivre (l’obligation de « poursuivre ou extrader » n’est donc pas remplie).

Lors de la ratification du Statut de la CPI, la France a fait jouer la « déclaration de l’article 124 » du Statut afin de protéger ses ressortissants impliqués dans des opérations militaires à l’extérieur, et notamment les opérations de « maintien de la paix » de l’armée française. Cette déclaration (utilisée seulement par la France et la Colombie pour protéger ses militaires) a eu pour effet de suspendre la compétence de la CPI en France pour les crimes de guerre pendant une période de 7 ans à partir de l’entrée en vigueur, c’est-à-dire jusqu’au 1er juillet 2009.

Derniers développements : vote de la loi du 13 juillet 2010 La France a ratifié le Statut de la CPI en 2000 et devait depuis lors modifier sa législation pour permettre de juger en France les criminels de guerre, criminels contre l’humanité et génocidaires. Ces crimes sont commis dans des pays où, souvent, la justice est impuissante à les réprimer. Le Statut de Rome prévoit donc « que leur répression doit être effectivement assurée par des mesures prises dans le cadre national et par le renforcement de la coopération internationale ». C’est pourquoi tout en créant la CPI, qui ne pourra juger que quelques cas par an, les plus emblématiques, le Statut affirme qu’ « il est du devoir de chaque État de soumettre à sa juridiction criminelle les responsables de crimes internationaux ».

C’est ce à quoi la loi votée le 13 juillet 2010, se refuse en posant à l’action de la justice française quatre conditions cumulatives (dites « Quatre verrous ») qui ne seront pratiquement jamais réunies :

La condition de résidence « habituelle » : les auteurs présumés de ces crimes internationaux pourraient être poursuivis seulement s’ils possèdent leur résidence « habituelle » en France. Aucun d’entre eux ne prendra évidemment ce risque, se satisfaisant fort bien de séjours plus ou moins prolongés en toute impunité sur le territoire français. Le monopole des poursuites confié au Parquet : les victimes de crimes internationaux se verraient priver du droit de se constituer parties civiles, c’est-à-dire engager des procédures contre les auteurs présumés des crimes. Cette initiative n’appartiendrait plus qu’au Parquet, dont l’expérience démontre la grande frilosité en l’espèce. Elle violerait le principe d’égalité puisque toutes les victimes auraient ainsi le droit de déclencher les poursuites, sauf celles des crimes les plus graves ; La condition de double incrimination, qui subordonne les poursuites en France à la condition que les faits soient punissables à la fois par le droit français et par la législation de l’Etat où ils ont été commis. Or précisément cet Etat peut très bien ne pas avoir prévu de disposition spécifique pour poursuivre les crimes concernés. L’inversion du principe de complémentarité en subordonnant les poursuites à la condition que la CPI ait décliné expressément sa compétence, inversant ainsi le principe posé par le Statut de Rome qui donne la priorité aux juridictions nationales. Toutes les ONG de défense des droits de l’homme ont été scandalisées par ce vote, même les plus modérées.

Ne faut-il pas craindre un refus de juger par principe les faits commis en Palestine ?

Les plaintes déposées par des Palestiniens à propos de l’agression israélienne du Gaza, l’opération Plomb Durci, placent la Cour devant de vraies responsabilités, pour défendre l’idée d’une même loi pour tous, et d’un combat sans discrimination contre l’impunité.

Pourquoi saisir cette Cour si le résultat est incertain ?

L’incertitude du résultat ne peut pas conduire à renoncer, ou alors c’est dire que rien ne se fera jamais dans la défense juridique des causes minoritaires. Il s’agit d’aller le plus en avant possible, et de construire progressivement la jurisprudence.

Y-a-t-il d’autres possibilités ?

Il n’existe que deux alternatives, qui sont des échecs. Il s’agit tout d’abord des systèmes dit de « compétence universelle » : un Etat se reconnait la possibilité des faits commis hors de son territoire et par des non-nationaux. Le principe est simple, mais en pratique, toutes les tentatives sont des échecs, car les Etats ne veulent pas prendre ces responsabilités. Les lois sont amendées pour exiger un rattachement territorial. La seconde possibilité est de créer une juridiction spéciale, mais c’est une illusion. Si une cour est créée, elle reprendra les textes de la CPI, et son personnel sera celui de la CPI, car on ne va pas tout reprendre à zéro, alors qu’il existe des textes désormais rodées et des équipes formées ! En réalité, le seul obstacle est de nature politique, et il serait aussi facile de s’engager sur ce processus, qui prendra beaucoup de temps, pour constater ensuite que le système est bloqué car cette cour spéciale ne dispose pas de l’autorité. Pourquoi les US, les puissances occidentales, la Chine et Israël qui refusent toute collaboration vraie avec la CPI l’accepteraient avec une cour spéciale ? Enfin, les tribunaux spéciaux – Ex-Yougoslavie, Rwanda, Sierra Leone – ont anticipé la création d’une juridiction permanente. Ce serait un recul, et une manière d’accréditer qu’il faut toujours un statut spécial pour les Palestiniens.

Qu’est ce que le rapport Goldstone ?

Ce rapport est le travail d’un groupe de cinq personnes, sous la direction du juge Richard Goldstone, désigné par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU pour établir un rapport sur cette opération militaire et son contexte. Un rapport n’est pas une enquête, et encore moins un jugement. Et le document de 575 pages mérite d’être étudié, avant être loué ou critiqué, car il est très précis. Quelles suites données au dépôt du rapport Goldstone ? Le rapport a été approuvé par le Conseil des droits de l’homme puis par l’assemblée général de l’ONU. La CPI n’a pas de lien organique avec le Conseil des droits de l’homme, ni avec l’Assemblée générale de l’ONU, même si elle peut recourir à leurs travaux. Le seul lien qui existe avec le système ONU, c’est avec le Conseil de sécurité, qui peut porter plainte, qui oblige le procureur à ouvrir un dossier, ou suspendre une enquête. Donc, en droit, l’adoption du rapport Goldstone par l’Assemblée Générale de l’ONU ne change pas la structure de la procédure. Elle est un appui considérable, car elle accrédite l’existence de crimes graves, entrant dans la compétence de la CPI. Après ce constat de la communauté internationale, il deviendrait très audacieux de soutenir que la matière n’existe pas pour une enquête.

Où en est la procédure ?

L’assemblée générale de l’Onu et le Conseil des droits de l’homme ont, après avoir approuvé le rapport Goldstone, laissé un délai d’un an pour que se mettent en place, en Israël et en Palestine, des processus de jugements de ces faits. Le 15 septembre 2010, le Conseil des droits de l’homme a reçu le rapport de sa commission d’enquête, montrant qu’aucune procédure de jugement ne pouvait être conduite sur place. L’affaire va donc revenir devant les deux instances de l’ONU. Logiquement, le dossier devrait être transféré à la CPI, mais on se doute bien que de nouvelles tentatives de détournement politiques vont avoir lieu.

Quel rôle joue le Conseil de sécurité ?

Ce qui est en cause, c’est la responsabilité des Etats membres du Conseil de Sécurité à défendre contre vents et marées le double standard, par un aveuglement condamné à terme. De même, le silence des grands pays, qui connaissent une authentique culture des droits de l’homme, engage leur responsabilité en marquant, devant le monde qui s’interroge, les limites de la conception occidentale des droits de l’homme. Un système juridique qui ne parvient pas à se saisir des crimes inaugure un redoutable cycle de crise. La gravité des faits, tels qu’ils ressortent des différents rapports, place dans le registre de compétence de la CPI : crime de guerre et crime contre l’humanité. La question restée en attente est celle de la recevabilité, du fait des incertitudes existant dans la communauté internationale sur le fait de savoir si la Palestine est ou non un Etat.

Sur quelles bases, l’Autorité nationale Palestine a-t-elle donnée compétence à la CPI ?

Le 22 janvier 2009, le gouvernement de Palestine a déposé auprès du Greffier de la Cour pénale internationale la déclaration prévue au paragraphe 3 de l’article 12 du Statut de Rome, qui permet à des États non parties au Statut d’accepter la compétence de la Cour. La déclaration d’acceptation de la juridiction de la Cour n’est pas une plainte, et elle ouvre vers le pouvoir d’opportunité du procureur, défini par l’Article 15 §1 : « Le Procureur peut ouvrir une enquête de sa propre initiative au vu de renseignements concernant des crimes relevant de la compétence de la Cour. » Nous en sommes à ce stade, actuellement : le bureau du procureur procède à une analyse préliminaire. Se posera à terme l’application du § 3 de l’article 15 : « S’il conclut qu’il y a une base raisonnable pour ouvrir une enquête, le Procureur présente à la Chambre préliminaire une demande d’autorisation en ce sens, accompagnée de tout élément justificatif recueilli. Les victimes peuvent adresser des représentations à la Chambre préliminaire, conformément au Règlement de procédure et de preuve. » C’est donc à ce stade la question posée : existe-t-il une base raisonnable pour ouvrir une enquête ? Sur le fond, oui, il est raisonnable d’ouvrir cette enquête, car de tous les rapports publiés, il ressort des indices sérieux et concordants sur la commission de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. C’est la question de forme, à savoir la recevabilité de la déclaration de l’Autorité Palestinienne, qui fait débat.

Etat ou pas Etat ?

Sur ce point, décisif, il faut distinguer le plan politique et le plan judiciaire. La question n’est pas « La Palestine est-elle un Etat » mais « La Palestine est-elle suffisamment un Etat, pour, dans le contexte de cette affaire et selon les statuts de la CPI, donner compétence à la Cour ? ». Dire que la Palestine n’est pas un Etat, c’est constater que manque certains attributs de souveraineté, et c’est la matière d’un débat. Mais, tout change quand il s’agit d’agir en justice pour obtenir, par le jugement, ce que l’agresseur a usurpé, pour mieux commettre ses violations du droit.

Il s’agit d’affirmer que le non respect du droit à l’autodétermination du peuple palestinien ne peut être un obstacle à l’action en justice des victimes palestiniennes. A partir du moment où une victime palestinienne agit en justice contre l’armée israélienne, comment peut-on contester la recevabilité de cette action au motif qu’une part de la souveraineté qui devrait être assurée par son gouvernement naturel, celui de Palestine, l’est par le gouvernement israélien, qui s’est accaparé ce droit par la force ?

Y-at-il de prises de postions favorables ?

Trois autorités ont adopté des positions favorables

  1. John Dugard

Il s’agit d’abord du rapport rédigé sous la direction de John Dugard « No safe place », et qui a été remis par le secrétaire général de la Ligue arabe à la CPI. Le rapport discute cette question de la recevabilité de manière très argumentée, pour conclure favorablement au paragraphe 599.

« Its fact finding in the Gaza Strip leads the Committee to suspect that during operation Cast Lead crimes within the jurisdiction of the ICC were committed. The Committee is of the opinion that the declaration lodged by the Government of Palestine authorizes the Prosecutor to initiate investigations proprio motu. If the analysis of the Prosecutor corroborates the suspicion of the Committee, this would justify a conclusion there is a reasonable basis to proceed with an investigation and the Pre-Trial Chamber would be required to do so. »

John Dugard s’est aussi très clairement affirmé dans une tribune du New York Times « Take the case :

« It is not necessary for the I.C.C. prosecutor to decide that Palestine is a state for all purposes, but only for the purpose of the court. In so deciding, Mr. Moreno-Ocampo should not adopt a restrictive approach that emphasizes the absence of a fully effective government, but rather an expansive approach that gives effect to the main purpose of the I.C.C.

[…] The purpose of the Rome Statute, as proclaimed in its preamble, is to punish those who commit international crimes and to prevent impunity. If an entity claiming to be a state, and recognized as such by a majority of states, makes a declaration under the I.C.C. statute that seeks to give effect to such goals, the I.C.C. should accept it as a state for the purpose of the I.C.C. statute.

A decision by the I.C.C. to investigate whether crimes were committed in Gaza, in the course of Israel’s offensive, would also give the I.C.C. an opportunity to show that it is not infected by a double standard and that it is willing to take action against international crimes committed outside Africa.”

  • Le rapport Goldstone

Le rapport Goldstone, lui-même, au titre de ses recommandations, au paragraphe 1970 :

« À l’intention du Procureur de la Cour pénale internationale, au sujet de la déclaration faite en vertu de l’article 12 3) par le Gouvernement de la Palestine et reçue par le Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale, la Mission considère que la responsabilité à l’égard des victimes et les intérêts de la paix et de la justice dans la région requièrent que le Procureur se prononce en droit aussi rapidement que possible ».

  • Le Procureur Moreno-Ocampo (CPI)

Dans une interview au Courrier de l’Atlas, n° 27, juin 2009, p. 21, le procureur près la CPI déclare : « Comment peut-on exclure la Palestine de la juridiction de la CPI, parce qu’elle n’est pas strictement un Etat, alors que personne d’autre ne peut intervenir en sa faveur ? »

Et dans le New York Times, le 1° juillet 2009, sous le titre “Impunity no more” le procureur avait résumé la mission de la CPI : « By integrating in one justice system states and an independent international court, the drafters provided incentives for states to prosecute the worst crimes themselves. If the states didn’t do it, the I.C.C. would. »

Pour en savoir plus

  • site de la CPI
  • site de la FIDH
  • Site de la Coalition Française pour la Cour Pénale Internationale