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25/11/13

Confé­rence autour de l’ouvrage « Israël, un État d’apartheid ? » par Julien Salingue

Julien Salingue a pré­senté une confé­rence le 14 novembre à la fac de lettres de Clermont-​​​​Ferrand, autour de l’ouvrage « Israël, un État d’apartheid ? », qu’il a co-​​​​édité avec Céline Lebrun (http://www.juliensalingue.fr/articl…).

La confé­rence (voir photos) était orga­nisée par l’association des Amis du Temps des Cerises, en parte­nariat avec AFPS 63. Plus de 90 per­sonnes ont assisté à la confé­rence (une heure) et par­ticipé au débat durant l’heure qui a suivi, sur l’histoire, l’actualité et les pers­pec­tives pour les Pales­ti­niens, et sur le mou­vement de soli­darité, en par­ti­culier BDS. Les par­ti­ci­pants ont acheté 9 livres à la sortie de l’amphi.

Extraits de la conférence :

Défi­nition de l’apartheid en droit inter­na­tional : « système de trai­tement poli­tique dif­fé­rencié (dis­cri­mi­nation ins­ti­tu­tion­na­lisée) sur une base nationale, eth­nique ou religieuse »

Sondage du journal israélien Haaretz (octobre 2012) : 58 % des israé­liens sondés pensent qu’il y a un pro­blème d’apartheid en Israël.

L’État de Palestine ? La Cis­jor­danie a environ la même surface que la Corrèze, et seulement 18 % de cette surface est admi­nistrée par l’Autorité Pales­ti­nienne (AP), mais en étant tota­lement mor­celée et sans pos­si­bilité de cir­culer librement entre les enclaves. La Palestine n’a pas de ter­ri­toire, ni de fron­tières qui ne soient contrôlées par Israël (sauf le sud de Gaza qui touche l’Égypte sur quelques km) ; tous les ter­ri­toires (cantons, ban­toustans) sont entourés par des murs, et au sein d’un ensemble allant du Jourdain à la Médi­ter­ranée, tota­lement contrôlé par l’État d’Israël. La Palestine n’a pas de res­sources propres, ni de véri­table économie.

Démarche de recherche de J. Salingue : pour tester la validité de la carac­té­ri­sation du système par « apar­theid », se demander quel est le trai­tement admi­nis­tratif et régle­men­taire qu’Israël applique aux Palestiniens ?

Replaçons ça dans l’histoire : à la fin du 19ème siècle, de nom­breux artisans et com­mer­çants juifs d’Europe orientale sont ruinés par le déve­lop­pement du capi­ta­lisme et l’antisémitisme se déve­loppe contre les pauvres et les migrants. Un mou­vement sio­niste de déve­loppe sur des bases poli­tiques (s’en aller pour avoir un État à soi, sur une base eth­nique, racia­liste et colo­niale), alors que les reli­gieux sont anti­sio­nistes. Le choix de la Palestine (qui rajoute une com­po­sante biblique) ne vient qu’après avoir envisagé l’Ouganda, l’Argentine, etc.

1897, premier congrès sio­niste mondial à Bâle, pour la « colo­ni­sation » de la Palestine en se plaçant sous la coupe d’une grande puis­sance occidentale

1917, décla­ration Balfour, dans le contexte de l’écroulement de l’empire ottoman et la main mise du Royaume Uni sur la Palestine. Les bri­tan­niques voient les sio­nistes comme un outil de contrôle du Proche Orient (com­pa­raison Ulster-​​Irlande avec Israël-​​Proche Orient). Th. Hertzl : Israël sera l’avant-garde de la civi­li­sation contre la barbarie.

Le déve­lop­pement du nazisme, puis le génocide des juifs, accélère l’émigration juive vers la Palestine (les États occi­dentaux ne sou­haitant pas les accueillir).

1945, 1/​3 de juifs et 2/​3 de non-​​juifs en Palestine.

1947, partition de la Palestine sous l’égide des grandes puissances.

1947-​​48, la Nakba : pour faire un Etat juif il faut expulser les non-​​juifs. De novembre 47 à mai 48 (donc avant la guerre avec les Etats arabes), 400.000 Pales­ti­niens sont expulsés, puis 400.000 autres de mai 48 à mai 49 (soit 80 % des habi­tants du futur État d’Israël).

Bien noter que ce qu’on appellera les « fron­tières » de 1967, ce sont en réalité les lignes d’armistice de 1949.

1967, guerre des 6 jours, la surface contrôlée par Israël est mul­ti­pliée par 4 ; occu­pation de 100% de la Palestine et d’autres terres. Mais les Pales­ti­niens ne partent pas : c’est une vic­toire ter­ri­to­riale pour Israël mais pas pour l’épuration eth­nique (il reste 50% de non-​​juifs sur ces territoires).

Pour être soutenu par l’occident, Israël doit i) être utile (par ex. contre Nasser, contre le Hez­bollah, …) et ii) donner une image démo­cra­tique. Or un État démo­cra­tique (droit égaux pour tous, quelle que soit la religion) ne peut pas être juif, et réciproquement.

Le plan Igal Allon de 1967 pré­figure exac­tement la situation actuelle : concentrer les Pales­ti­niens dans de petites zones géo­gra­phiques ; prise du contrôle de Jéru­salem et de la vallée du Jourdain. La colo­ni­sation actuelle n’est pas brouillonne mais pla­nifiée de longue date, sur une base géos­tra­té­gique, incluant les res­sources en eau.

1993, accords d’Oslo. On ne donne des ter­ri­toires à l’AP que si elle montre qu’elle peut y faire régner l’ordre (l’occupé main­tient l’ordre pour l’occupant).

Système d’apartheid : 93 % de la surface d’Israël n’est pas ache­table par les Pales­ti­niens de 48 (citoyens d’Israël). En Cis­jor­danie, l’AP est dominée par « l’administration civile » (càd l’armée et le ministère de l’intérieur israé­liens), qui ajoute son système juri­dique aux sys­tèmes anté­rieurs (ottoman, bri­tan­nique, jor­danien) et pales­tinien. 2.500 ordres mili­taires ont été édictés ; en 2011, 10.000 Pales­ti­niens passent devant les tri­bunaux mili­taires et plus de 95% sont condamnés.

La fiction des négo­cia­tions sur 2 États cache en fait la colo­ni­sation et l’apartheid. Cer­tains Pales­ti­niens disent qu’ils ne veulent pas un État, mais pouvoir voter pour leurs députés au par­lement dans un système égalitaire.

Il n’y a pas de natio­nalité israé­lienne. Les citoyens israé­liens sont de natio­na­lités diverses : juive, « arabe » (le mot pales­tinien est banni), polo­naise, catalane, etc. La Cour suprême israé­lienne a refusé la natio­nalité israé­lienne à des citoyens israé­liens qui la demandaient.

L’État d’Israël est « démo­cra­tique » pour les juifs, mais il est juif pour les arabes. Il n’y a pas de mariage civil en Israël. On ne connait pas les sta­tis­tiques des flux migra­toires. Les sans papiers sont expulsés au bout de 2 ans pour sau­ve­garder la pureté eth­nique. En 2013, on a des sys­tèmes de gar­deries séparées pour les enfants noirs et blancs…

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