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30/05/23

Il est temps de mettre un terme à l’exploitation des logiciels espions

Pourquoi la réglementation de l’UE sur les logiciels espions risque de nuire aux citoyens du monde entier?

Date d'origine : 29/05/2023
Auteur : Comité national palestinien BDS (BNC)
Traduit par : AGP pour BDS France

Les États-Unis et l’Union européenne semblent actuellement être les régulateurs les plus actifs en matière de logiciels espions. Pourtant, leurs processus bureaucratiques et législatifs visent à réglementer les moyens par lesquels ces puissances peuvent profiter et contrôler le marché de cette arme dangereuse, qui est principalement dominé par les entreprises et les technologies israéliennes. À ce stade, il est essentiel que nous fassions pression pour empêcher l’UE de commercialiser les logiciels espions israéliens et autres, afin de protéger les communautés du monde entier.

Les États-Unis semblent avoir pris la tête de la lutte contre la prolifération de la technologie dangereuse des logiciels espions, mais derrière de grandes déclarations sur la protection de la vie privée et des droits civils des citoyens contre la surveillance invasive, les autorités américaines ont continué à acheter des logiciels espions. Dans le même temps, l’Union européenne, qui n’a jusqu’à présent même pas tenté de protéger ses propres citoyens contre les dangers des logiciels espions, est devenue une plaque tournante pour l’exportation de logiciels espions vers le reste du monde.

Les logiciels espions sont des technologies militaire qui violent intrinsèquement les droits de l’homme, car ils exploitent les vulnérabilités des téléphones et autres appareils, afin de surveiller les personnes, de les localiser et de transformer leurs appareils en outils de surveillance en ouvrant le microphone et la caméra à l’insu du propriétaire pour espionner son environnement. Les logiciels espions contournent également le cryptage peer-to-peer en piratant l’ensemble de l’appareil, y compris la messagerie électronique et les services de messagerie (tels que Signal et WhatsApp), et permettent aux espions de télécharger tout l’historique des communications d’un appareil piraté ou d’utiliser des applications pour diffuser de la désinformation.

Edward Snowden a appelé à l’interdiction des logiciels espions et a averti qu’ils donnaient un pouvoir illimité à leurs utilisateurs, allant au-delà des limites que les décisions de justice pourraient imposer à la surveillance policière normale. Décrivant les fabricants de logiciels espions, Edward Snowden a déclaré : « Ils ne fabriquent pas de vaccins – la seule chose qu’ils vendent, c’est le virus ».

Les sociétés israéliennes de logiciels espions ont été les premières à transformer cette technologie d’armement en produit commercial. Une fois que le génie est sorti de la bouteille, c’est une véritable bataille qui s’est engagée pour en prendre le contrôle. Après avoir servi dans des unités de renseignement qui utilisaient des logiciels espions contre des civils palestiniens dans le cadre de l’application du régime d’apartheid israélien, des officiers de renseignement israéliens ont créé des sociétés privées et, avec l’approbation et le soutien du ministère israélien de la défense, ont commencé à vendre des logiciels espions en Europe, aux États-Unis et dans le reste du monde, y compris à certains des pires régimes autoritaires de la planète, pour les utiliser contre des journalistes, des avocats et des défenseurs des droits de l’homme. Pour le gouvernement israélien, les logiciels espions sont devenus une monnaie d’échange permettant d’obtenir des faveurs diplomatiques dans le monde entier.

Le président américain Biden a suivi l’exposé de Forbidden Stories, Citizen Lab et Amnesty International, en juillet 2021, sur la prolifération des logiciels espions israéliens en blacklistant deux des sociétés israéliennes incriminées : NSO Group et Candiru. NSO Group a immédiatement créé une société écran afin de continuer à vendre au gouvernement américain. En mars de cette année, M. Biden a signé un décret interdisant totalement le commerce de logiciels espions aux États-Unis, mais même ce décret n’est pas appliqué.

Depuis le début, l’Union européenne s’est montrée plus intéressée par les sociétés israéliennes de logiciels espions et a coopéré avec elles. Contrairement aux États-Unis, ces entreprises n’hésitent pas à infecter directement les téléphones des fonctionnaires européens et des hommes politiques de haut rang, et des scandales liés aux logiciels espions ont éclaté dans 14 États membres de l’UE.

Les deux principales sociétés israéliennes de logiciels espions, NSO Group et Intellexa, ont établi leur siège au sein de l’UE, respectivement au Luxembourg et à Chypre. Les entreprises israéliennes comptent sur la complicité de l’UE avec les crimes coloniaux israéliens et savent qu’elles ne seront pas soumises à la même surveillance que les entreprises non israéliennes. Déjà, plutôt que de définir les logiciels espions comme une arme dangereuse (comme le fait lui-même le gouvernement israélien !), l’UE a choisi de les définir comme des « biens à double usage ».

Même la commission d’enquête mise en place par le Parlement européen, appelée commission PEGA, a été si peu financée qu’elle n’a même pas eu accès à des chercheurs parlant hébreu pour traduire les informations sur les sociétés israéliennes de logiciels espions. Les recommandations de la commission PEGA sur la manière de protéger les citoyens européens ont été soumises au Parlement européen et feront l’objet d’un vote à la fin du mois de juin.

Parallèlement, la Direction générale du commerce de l’UE est impatiente de finaliser la réglementation sur les exportations de logiciels espions. Elle est prête à soumettre le reste du monde à la violation de la vie privée et des droits de l’homme contre laquelle la commission PEGA tente de protéger les citoyens de l’Union européenne.

Jusqu’au 9 juin, la direction du commerce de l’UE a ouvert un processus permettant aux individus et aux organisations du monde entier de soumettre leurs contributions ici :

Agissez dès maintenant

Pour commencer à mobiliser une pression mondiale afin d’empêcher l’UE de vendre des logiciels espions, veuillez remplir le formulaire et exiger une interdiction totale des exportations de logiciels espions. L’UE ne devrait jamais profiter de l’apartheid israélien et des violations des droits de l’homme dans le monde.

Les politiques de régulation des États-Unis et de l’UE ne sont rien d’autre que des tentatives de contrôler les logiciels espions afin de garder pour eux les bénéfices et le pouvoir de surveillance. Ni les États-Unis ni l’Union européenne n’ont montré une réelle préoccupation pour les violations des droits de l’homme commises par les logiciels espions dans les pays du Sud. Les États-Unis ne se sont montrés préoccupés que lorsque des logiciels espions en Ouganda ont affecté leur propre personnel diplomatique, et l’Union européenne que lorsque des logiciels espions au Rwanda ont affecté des législateurs européens et que des logiciels espions au Maroc ont infecté les téléphones de la présidence française.

Si vous ne pensez pas que la surveillance peut nuire à votre qualité de vie même si vous n’êtes pas engagé dans une activité illégale, demandez aux Palestiniens comment la surveillance ruine la vie de milliers de personnes.

Le schéma qui se dégage est clair. L’État israélien d’apartheid utilise des logiciels espions contre les Palestiniens et les exporte à des fins lucratives. L’UE est la prochaine étape… les profits des entreprises de logiciels espions sont plus importants que les droits des personnes. Sans une action coordonnée au niveau mondial, ce schéma se poursuivra.

Que ce soit dans le Sud ou dans le Nord, les entreprises israéliennes de logiciels espions ont choisi de se concentrer sur l’UE, et nous devons empêcher l’UE de devenir la plaque tournante des exportations de logiciels espions. Chaque être humain a un intérêt dans cette affaire.